Vivre livre (22) Lettre à Sophie Tolstoï

Chère Sophie Tolstoï,

Je lis actuellement votre journal et je veux vous dire combien je suis émue par votre témoignage. Je suis convaincue que vous êtes une personne bonne, une amoureuse des arts avec beaucoup d'esprit et une femme d'une très grande sensibilité. Je suis très peinée des a priori défavorables à votre sujet qui sont véhiculés depuis des décennies malgré la publication de vos journaux qui rétablissent la vérité.

Vous avez aimé votre mari avec abnégation alors que vous avez toujours été seule dans les moments les plus difficiles. Être l'épouse d'un génie de la littérature, qui plus est idolâtré, conduit à vivre dans son ombre et à être méprisée par ses disciples quand jaillit la lumière. Jalousie? Bêtise? Ignorance? Aveuglement?

J'ai beaucoup de tendresse pour vous Sophie, votre souffrance ne vous déshonore pas et vous rend admirable car vous êtes toujours restée digne face à l'adversité. Vos témoignages sont si sincères et vous aimiez tellement votre mari (que j'admire pour ses livres) que je ne comprends pas pourquoi vous avez été autant critiquée, c'est d'une absurdité! Jamais vous ne lui avez voulu le moindre mal, vous avez toujours été à son service. Quand vous étiez malade on vous soignait mais le sujet revenait toujours sur sa personne. On vous a empêchée d'assister à ses derniers moments et quelle triste image quand vous tentez d'apercevoir votre époux mourant à travers la fenêtre de la gare d'Astapova. Vos cris étaient des cris d'amour. Je sais combien vous avez été dévouée à l'éducation de vos enfants, aux soins domestiques, aux relations avec la Cour sans oublier les traductions, les relations publiques, votre travail de copiste.

Quand j'irai chez vous à Iasnaïa Poliana, je vous imaginerai jouant Beethoven que vous avez tant aimé, je penserai à votre talent de photographe, belle et aimante Sophie.

Recevez toute mon admiration...

Sophie Tolstoï à la fenêtre de la gare d'Astapovo cherchant à voir son mari.